Joker a écrit : ↑13 sept. 2018, 19:26
En outre, j'ai lu récemment "L'Effroyable Tragédie" de Marie-Pierre Rey et elle y fait état de témoignages rapportant des exactions commises par la Grande Armée, troupes françaises inclues, sur des prisonniers russes.
"Bléssés russes achevés - Ces atrocités eurent lieu. J'ai vu ces malheureux ainsi tués. Ce qu'il y a de consolant, c'est que ce n'étaient pas par des français........On entassait les bléssés dans l'église de Mojaïsk, ....... Il est certain que personne n'a cru et que personne croira que Napoléon fût l'auteur d'une telle atrocité. Il n'en est pas moins vrai que des prisonniers russes ont été fusillés et il n'est pas croyable (ainsi que l'ont prétendu les Espagnols et les Portugais qui escortaient ces prisonniers) qu'ils (les prisonniers) aient cherché à désarmer ceux qui les conduisaient. Les malheureux, ainsi fusillés, étaient tous exténués par la faim et la fatigue ....."
(Lignières, Souvenirs)
"Au moment du départ de l'armée russe avant notre entrée dans Moscou, 8 à 10000 soldats russes désertèrent , ils étaient restés dans les jardins vers la barrière de Vladimir; on les y arrêta 4 ou 5 jours après , par les ordres du Maréchal Mortier; le capitaine Crevel , aide de camp du général Berthezène,les avait découverts et fut chargé de les réunir ;
ils furent parqués et mal nourris; un bon nombre mourut avant notre retraite; les autres confiés à la garde des espagnols et des portugais, furent décimés par ces étrangers."
(Berthezène, Souvenirs)
« Le soir de cette longue journée, la colonne impériale approcha de Gjatz, surprise de trouver sur son passage des Russes tués tout nouvellement. On remarquait que chacun d'eux avait la tête brisée de la même manière, et que sa cervelle sanglante était répandue près de lui. On savait que deux mille prisonniers russes marchaient devant, et que c'étaient des Espagnols, des Portugais et des Polonais qui les conduisaient. Chacun, suivant son caractère, s'indignait, approuvait, ou restait indifférent. Autour de l'Empereur, ces différentes impressions restaient muettes. Caulaincourt éclata, il s'écria « que c'était une atroce cruauté. Voilà donc la civilisation que nous apportions en Russie ! Quel serait sur l'ennemi l'effet de cette barbarie ? Ne lui laissions-nous pas nos blessés, une foule de prisonniers ? Lui manquerait-il de quoi exercer d'horribles représailles ? »
Napoléon garda un sombre silence, mais le lendemain ces meurtres avaient cessé. On se contenta de laisser ces malheureux mourir de faim dans les enceintes où, pendant la nuit, on les parquait comme des bêtes. C'était sans doute encore une barbarie; mais que pouvait-on faire ? Les échanger ? L'ennemi s'y refusait. Les relâcher ? ils auraient été publier le dénuement général, et, bientôt réunis à d'autres, ils seraient revenus s'acharner sur nos pas. Dans cette guerre à mort, leur donner la vie, c'eût été se sacrifier soi-même. On fut cruel par nécessité. Le mal venait de s'être jeté dans une si terrible alternative.
Au reste, dans leur marche, vers l'intérieur de la Russie nos soldats prisonniers ne furent pas traités plus humainement, et là, pourtant, l'impérieuse nécessité n'était point une excuse. »
(Ségur, Histoire de Napoléon et de la Grande Armée pendant l’année 1812)