Fontanes s'y colla :la remonte a écrit : ↑27 janv. 2021, 15:23 " il serait bien de charger un orateur de faire un discours sur l'avantage de faire la guerre hors de sa patrie, "
on est bien là dans une logique économique de prédation pour ne pas dire de pillage![]()
"Ainsi, dans cette partie de son histoire comme dans toutes les autres, notre Monarque n’a plus de rivaux ; et, pour ne point sortir de l’art de la guerre dont cette cérémonie auguste rappelle tous les prodiges, combien tout ce qui fut grand disparaît à côté des entreprises extraordinaires dont nous sommes témoins ? On combattait, on négociait jadis pendant des années pour la prise de quelques villes, et maintenant quelques jours décident le sort des royaumes. Quel nom militaire, quel talent politique, quelle gloire ancienne ou moderne ne s’abaisse désormais devant celui qui, des mers de Naples jusqu’aux bords de la Vistule, tient en repos tant de peuples soumis ; qui, campe dans un village sarmate, y reçoit, comme à sa cour, les ambassadeurs d’Ispahan et de Constantinople étonnés de se trouver ensemble ; qui réunit dans le même intérêt les sectateurs d’Omar et d’Ali ; qui joint d’un lien commun et l’Espagnol et le Batave, et le Bavarois et le Saxon ; qui, pour de plus vastes desseins encore, fait concourir les mouvements de l’Asie avec ceux de l’Europe, et qui montre une seconde fois, comme sous l’Empire romain, le génie guerrier s’armant de toutes les forces de la civilisation, s’avançant contre les barbares, et les forçant de reculer vers les bornes du monde !
Ce n’est point à moi de lever le voile qui couvre le but de ces expéditions lointaines ; il me suffit de savoir que le grand homme, par qui elles sont dirigées, n’est pas moins admirable dans ce qu’il cache que dans ce qu’il laisse voir, et dans ce qu’il médite, que dans ce qu’il exécute. Veut-il relever ces antiques barrières qui retenaient, aux confins de l’univers police, toutes ces hordes barbares dont le Nord menaça toujours le Midi ? Sa politique n’a point encore parlé ; attendons qu’il s’explique, et remarquons surtout que ce silence est le plus sur garant de ses intentions pacifiques.
Il a voulu, il veut encore la paix : il la demanda au moment de vaincre, il la redemande après avoir vaincu. Quoique tous les champs de bataille qu’il a parcourus dans trois parties du monde, aient été les théâtres constants de sa gloire, il a toujours gémi des désastres de la guerre. C’est parce qu’il en connait tous les fléaux, qu’il a soin de les porter loin de nous. Cette grande vue de son génie militaire est un grand bienfait : il faut payer la guerre avec les subsides étrangers, pour ne pas trop aggraver les charges nationales. Il faut vivre chez l’ennemi, pour ne point affamer le peuple qu’on gouverne. La sécurité intérieure est alors le prix de ces fatigues inouïes, de ces privations sans nombre, de ces dangers de tout genre auxquels se dévoue l’héroïsme. Comparez à notre situation présente celle des sujets de Frédéric, quand, chassé deux fois de sa capitale, malgré ses exploits. il ne pouvait, même après la victoire, défendre l’industrie de ses villes et les moissons de ses campagnes contre la férocité du Russe et le pillage de l’Autrichien. Telle n’est point notre destinée. Paris, l’Empire entier, reposent dans un calme profond sous l’autorité de cette même main qui répand la terreur à trois cents lieues de nos frontières. Les lois du chef de l’État nous sont transmises avec sagesse par un représentant digne de les interpréter, habile dans toutes les carrières administratives, orné de toutes les vertus civiles, et qui possède pour nous la première de toutes les qualités, celle de bien connaître l’esprit français qu’il faut suivre quelquefois pour le mieux conduire. La confiance du Souverain ne pouvait être mieux placée que dans un homme d’État, dont la parole fut toujours fidèle et dont l’accueil satisfait tous les cœurs. À ces traits, qui sont faciles à reconnaître, les yeux de cette assemblée se tournent vers vous, Monseigneur, et ses éloges confirment le mien.
Mais, en jouissant de l’intégrité de notre territoire, et des bienfaits d’une administration paisible et régulière, songeons par quels travaux ces avantages sont achetés. Combien de reconnaissance et d’admiration doit accompagner cette brave armée qui, dans les solitudes de la Pologne, combattit tous les besoins et tous les périls, et qui triompha des saisons comme des hommes ! Quel orateur pourra louer dignement cette garde impériale, dont chaque compagnie vaut un grand corps d’armée, et tous ces soldats enfin dont chacun mérite d’entrer dans cette garde invincible ! Quels honneurs décernerons-nous à ces lieutenants du chef suprême, à ces guerriers qui, dans toute autre armée, auraient le premier rang, et qui, dans celle-ci, sont plus contents et plus fiers d’occuper, à une longue distance, la seconde place ? Ce n’est point assez de vaincre pour ces invincibles légions, elles veulent encore, avec une magnanimité vraiment française, effacer jusqu’au souvenir des défaites de leurs ancêtres. Après avoir repris dans les arsenaux de l’Autriche l’armure de François Ier, captif à Pavie, elles transportent à Paris cette colonne injurieuse qui s’élevait dans les champs de Rosbach, et font ainsi du monument de nos revers un nouveau monument de nos triomphes."